Embarquons-nous à bord d'un beau voilier ou sur un radeau de fortune et laissons-nous porter par les eaux jusqu'aux rives du roi Rapontchombo.
Venez, enfonçons-nous dans les profondeurs de l'histoire et remontons le temps.
Nous sommes en 1839.
Il fait chaud.
Sous le soleil d'Afrique centrale, un pays de plus va léguer son sort "à nos ancêtres les Gaulois": il s'agit du Gabon.
Nous sommes le 9 février. Sur les côtes du royaume Mpongwè, Dowè Rapontchombo, le plus puissant des rois locaux, s'apprête à signer un pacte avec un homme venu d'ailleurs, de cet autre côté du rivage, là où les hommes ont une autre couleur, par-delà l'océan Atlantique, là d'où viennent et repartent des navires avec à leur bord, des visages qu'on ne reverra jamais. Cet homme, Louis Edouard Bouët-Willaumez est à la fois: comte, officier de marine, explorateur et amiral français. Il fait la chasse aux bateaux négriers en escale sur les plages africaines.
Nous sommes en pleine période d'affranchissement des esclaves (la traite ne sera formellement interdite qu'à partir de 1848 ) et en ce 9 février 1839 le Gabon s'apprête à tomber les deux pieds joints dans les méandres de la colonisation. Il y a aujourd'hui 176 ans.
Un fleuve. Le Komo. Un estuaire chargé de souvenir, une plage, vitrine sur le nouveau monde et des pas. Oh, si le sable pouvait parler, il nous dirait la cadence de ces esclaves échappés d'un navire brésilien: l'Elizia; il nous dirait ses pieds qui courent vers une nouvelle terre d'asile. Il nous dirait le souvenir qu'il a gardé de ces hommes et ces femmes installés, là, sur cette rive-droite, pour former une famille, un village, une capitale, aujourd'hui.
Libreville. C'est le nom que lui a donné monsieur Bouët-Willaumez en 1850. Libreville, en souvenir de ces affranchis qui, les premiers, ont peuplé cette terre et bâtie de leur chair un hommage à la liberté. Libreville, point de départ à la colonisation en cette fin du 19ème siècle.
1839. Le roi Dowè signe pour obtenir une protection contre les chasseurs d'ébène et laisse entrer la colonisation sans même savoir où elle mène. Une porte se ferme. Une autre s'ouvre. Tout s'arrête. Tout recommence. Sans cesse. Spirale infernale d'une histoire qui se répète. Inlassablement. Depuis la nuit des temps. Du sommets des pyramides aux cales des navires de la mort, tout s'entremêle inexorablement... l'histoire est rebelle: elle s'invente et se réinvente sous d'autres maux, sous d'autres formes. Domination, assouvissement. Qu'est-ce que la liberté?
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